LE DÉFI DE LA NON-VIOLENCE

 

Le défi de la non-violence
Le défi de la non-violence

À Simone et Jacques de Bollardière, avec admiration et affection.

                                                                              
                                                                                      Jean-Marie Muller

Chapitre 1

Sur les chemins de la non-violence

- Jean-Marie Muller, vous êtes connu comme non-violent, comme militant de la non-violence. Votre choix s'explique-t-il par vos origines, sur une terre tourmentée, blessée par les guerres? Autrement dit, votre choix est-ce une réaction contre la violence ou un héritage de parents pacifistes ?

- J'ai élu domicile à Orléans. Cependant on me fait souvent remarquer que mon accent trahit mes origines franccomtoises. Je suis né, en effet, à Vesoul. Bien qu'il s'agisse de la préfecture de la Haute-Saône, Vesoul présente toutes les caractéristiques d'une petite sous-préfecture de province. Il ne s'y passe rien. En revanche, on peut encore y vivre à un rythme humain. Mes parents y vivent toujours et, lorsque je veux travailler au calme, c'est à Vesoul que je me retire.

Né en 1939, toute ma première enfance s'est déroulée pendant la guerre. Bien que tout gosse lorsque celle-ci s'est terminée, j'ai tout de même gardé de cette époque des souvenirs très précis. Mes parents habitaient Neufchâteau, dans les Vosges, lorsque cette ville s'est trouvée prise sous la menace de bombardements. C'était en 1944. La sirène donnait l'alerte et nous devions quitter la ville. J'ai le souvenir d'avoir été trimbalé dans les bois environnants où l'on tentait de se mettre à l'abri. Par la suite, mes parents ont dû évacuer Neufchâteau. Ils sont venus s'installer dans un petit village de la Haute-Saône, à Montigny-les-Vesoul. Ils pensaient y être plus tranquilles. Mais les événements allaient en décider autrement.

Un dimanche matin, une rumeur se répand. On dit que les Allemands arrivent. En effet, le village se trouve rapidement investi par tout un régiment qui a déjà commencé à faire retraite. Ils pillent le village et donnent l'ordre à tous les hommes de se rassembler le long d'un mur. Je vois encore mon père nous quitter, je me vois pleurer en demandant quand il rentrerait. Je m'en souviens, un soldat allemand se trouvait dans notre cour. Il cherchait alors à me consoler. Il me disait que mon père reviendrait bientôt. Effectivement il devait être relâché quelques heures plus tard. Mais une vingtaine d 'hommes ont été embarqués dans des camions : ils ne devaient jamais revenir. Il semble que mon père ait échappé à cette rafle parce qu'il avait pu attester de sa qualité de cheminot et que les Allemands avaient besoin de faire rouler les trains. Je me rappelle aussi que les Allemands avaient mis le feu à une maison qui se trouvait tout près de chez nous, parce qu'ils pensaient que des armes y étaient cachées.

Un autre souvenir, l'arrivée des Américains. Une dizaine d'entre eux s'étaient installés tant bien que mal dans notre ...

 

 

Table des matières

1. Sur les chemins de la non-violence

II. Condamné pour délit de non-violence

III. Préférer la justice à l'ordre

IV. Sur un voilier contre une flotte de guerre

V. La non-violence ? Une action politique !

VI. L'espérance des opprimés

Quatrième de couverture

Cet ouvrage ne présente ni des mémoires ni des confessions, mais le chemin qui a conduit J.-M. Muller à prendre la tête du mouvement de la non-violence en France : Orléans, Mururoa ... En cours de route, l'auteur brosse le portrait des hautes figures de ce combat de la non-violence : Guy Riobé, Lanza dei Vasto, Jacques de Bollardière.

S'appuyant sur son expérience et l'actualité, il rend compte de sa conviction profonde : la violence est un fait culturel, et non pas naturel. Elle n'est donc pas inéluctable.

À l'heure où la violence risque de nous conduire, tous ensemble, dans une impasse, personne ne peut ignorer cette voie, cette voix : elles nous proposent une autre manière de penser qui est, avant tout, une autre manière de vivre.